Un ancien cobaye témoigne. Ce lundi sur RMC, Stéphane Schubhan, 42 ans, l'un des six hommes hospitalisés suite à l'accident thérapeutique qui a fait un mort le 17 janvier à Rennes, revient sur cette terrible affaire. Alors que Biotrial, qui menait l'essai, avait évoqué la possible absence de séquelles, il souffre pourtant toujours de lourdes conséquences neurologiques. Ainsi, aujourd'hui, il peut difficilement marcher et sa vision demeure fortement altérée.
"Je ne tenais plus sur mes jambes"
"Pour moi, c'était un essai comme les autres. Cela devait bien se passer et dans un premier temps, la première semaine, c'était le cas. Mais ensuite ça s'est dégradé", explique-t-il d'une voix saccadée car il "a encore du mal à parler". "J'étais un des cas les plus graves, ajoute-t-il. Du jour au lendemain, j'ai eu des maux de tête mais, pour eux (Biotrial, ndlr), ce n'était pas très important. Ils m'ont dit de prendre un médicament et d'aller me coucher".
Des maux de tête qui vont durer plusieurs jours sans que le laboratoire "ne les prennent en compte": "Le dernier jour ça a vraiment été terrible donc ils m'ont donné un médicament. Mais le lendemain, ça n'allait toujours pas. Je ne tenais plus sur mes jambes, je voyais mal, je ne pouvais plus parler, se souvient-il. Là, ils se sont donc inquiétés". Stéphane Schubhan est alors transféré au CHU de Rennes "pour plus d'analyses et savoir quelle était la cause de mes maux".
"Pas certain de retrouver toutes mes capacités"
Malgré un premier traitement, son cas s'empire les deux jours suivants: "Ça s'est aggravé au niveau du cerveau. Il y a eu de graves séquelles, que je conserve encore aujourd'hui même s'il y a une grosse amélioration de la situation. Avant je ne pouvais pas m'asseoir, marcher, avaler ni même parler… Je ne pouvais rien faire. J'étais devenu un légume… Et même si mon état s'est amélioré, il me reste encore des séquelles. Je ne tiens pas debout plus de dix minutes, je vois très mal et j'ai un débit de parole très compliqué… Je suis toujours en rééducation et je ne suis pas certain de retrouver un jour toutes mes capacités".
Mais les conséquences ne sont pas seulement physiques: "Je ne peux pas reprendre le travail, je ne peux pas avoir de loisirs... Je ne peux rien faire, même regarder la télévision demeure compliqué". Et de l'assurer: "Pour les médecins, je suis un miraculé… Ils ne pensaient pas que j'allais m'en sortir… Ils ont dit la vérité à ma femme en lui demandant de revenir avec les enfants pour qu'ils voient leur père une dernière fois".
"Qu'ils disent la vérité"
Si Stéphane Schubhan accepte de témoigner aujourd'hui c'est pour rétablir sa vérité suite aux explications données par Biotrial: "J'étais vraiment très en colère quand ils ont dit que ce n'était pas de leur faute. Et puis d'apprendre que des chiens sont morts au cours d'essais précliniques, ça m'a encore mis plus en colère. Ils m'auraient dit cela en m'indiquant que ces essais s'étaient mal passés, je n'aurais pas participé à ces tests. Je n'aurais pas pris le risque…Je n'aurais pas joué avec ma santé."
Si l'inspection générale des affaires sociales (Igas) a relevé des "manquements majeurs" dans un rapport rendu début février, la société Biotrial assure quant à elle n'avoir identifié "aucune faute". "Je ne demande pas de réparation mais des excuses, s'emporte pour sa part Stéphane Schubhan. Je veux qu'ils disent la vérité, qu'ils ne cachent rien, qu'ils disent qu'il y a eu une erreur, qu'ils avouent…"
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